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Allocution en visioconférence de Monsieur Harvesh Seegolam, Gouverneur de la Banque de Maurice et Président du Groupe des Superviseurs Bancaires Francophones à l'occasion de la Réunion Plénière du Groupe des Superviseurs Bancaires Francophones

  • Monsieur Emmanuel Rocher, Directeur des Affaires Internationales de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) et Secrétaire Général du Groupe des Superviseurs Bancaires Francophones
  • Monsieur Mardayah Kona Yerukunondu, Premier Adjoint au Gouverneur, Banque de Maurice
  • Madame Hemlata Sadhna Sewraj-Gopal, Seconde Adjointe au Gouverneur, Banque de Maurice
  • Membres du Groupe des Superviseurs Bancaires Francophones
  • Mesdames et Messieurs

Tout protocole observé,

Permettez-moi de vous souhaiter à tous la bienvenue à cette Réunion Plénière du Groupe des Superviseurs Bancaires Francophones.

C’est avec un immense plaisir que La Banque de Maurice vous accueille une deuxième fois en cette année, après notre Réunion de mars dernier, en présentiel, à l'île Maurice.

Tout d’abord, il serait opportun de nous remémorer les échanges fructueux que nous avons eus au premier trimestre, concernant la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme ainsi que certains sujets connexes, tels que les nouvelles technologies visant à aider les superviseurs dans leur tâche de plus en plus exigeante et les normes internationales fournissant l’encadrement nécessaire à l’accomplissement de leur mission.

Il est essentiel de rappeler, en particulier, l’initiative de la Banque Al-Maghrib et la Banque de Maurice visant à rédiger un rapport conjoint sur la lutte contre le blanchiment des capitaux dont nous aurons l’occasion, un peu plus tard aujourd’hui, d’en connaître les détails.

Mesdames et Messieurs, les défis auxquels sont confrontés les banques centrales et les superviseurs bancaires sont multiples. D’une part, la reprise économique dans l’ère post-Covid et les risques émanant des conflits géopolitiques contemporains ont donné lieu à une inflation galopante poussant les banques centrales du monde entier à resserrer leurs politiques monétaires en augmentant durablement les taux d’intérêt.  D’autre part, le changement climatique, la digitalisation du système et des services bancaires, la cybersécurité et les récentes faillites bancaires aux États-Unis et en Suisse sont autant de sujets qui requièrent inévitablement l’attention et les actions des superviseurs.

Les thèmes à l’ordre du jour sont particulièrement pertinents dans cet environnement difficile, où les standards internationaux représentent des normes importantes destinées à soutenir les juridictions dans le renforcement de la stabilité des systèmes bancaires et financiers, ainsi qu’à minimiser les risques systémiques.

Nous allons, comme convenu, faire état des principales innovations de l’accord international de Bâle III ainsi que de la révision des Principes Fondamentaux du Comité de Bâle pour un contrôle bancaire efficace.

À ce stade, il convient de souligner que les accords de Bâle ont subi, depuis Bâle I, un renforcement constant des exigences en matière de fonds propres pour couvrir les différents types de risque tels que le risque de crédit, de marché, opérationnel, ainsi qu’un coussin de conservation. Bâle III constitue ainsi une refonte fondamentale du régime mondial de fonds propres réglementaires, mettant particulièrement l’accent sur le quantum et la qualité des fonds propres des banques.

De plus, Bâle III introduit des normes de liquidité et des mesures macro prudentielles pour prévenir l’accumulation du risque systémique. Ce nouveau dispositif renforce considérablement la capacité des banques à absorber des pertes et contribue, dans le même sillage, au maintien de la stabilité financière.

La récente pandémie de Covid-19 a démontré que les réformes mises en œuvre dans le cadre de Bâle III ont amélioré la résilience du secteur bancaire. Le secteur bancaire a ainsi pu résister au choc tout en soutenant l’économie réelle à travers les moratoires ainsi que d’autres acteurs impactés par la pandémie.

Le Secrétariat Général de l’ACPR fera le point sur les innovations de Bâle III ainsi que sur l’état de leur mise en œuvre dans les grandes juridictions.

Les normes de Bâle s'appliquent, à priori, aux banques actives à l'échelle internationale. Il est donc impératif de souligner que chaque juridiction doit déterminer son degré d’adhésion aux normes de Bâle selon ses spécificités. La notion de proportionnalité est un facteur clé à prendre en compte surtout pour les non-membres du Comité de Bâle, comme Maurice.

L'île Maurice a choisi d’adhérer en large partie aux accords de Bâle, en tenant compte de son système financier centré sur les banques. En effet, sur les 19 banques opérant dans la juridiction, huit sont des filiales de grandes banques internationales tant dis que trois sont des succursales de banques internationales.

En outre, je voudrais souligner qu’en tant que centre financier international de renom, Maurice souscrit aux normes ainsi qu’aux meilleures pratiques internationales. Puisque Bâle III est la norme pour notre secteur bancaire, mener à bien les réformes nécessaires est impératif afin de maintenir notre avantage compétitif et préserver la réputation de notre juridiction.

Mesdames et Messieurs, Bâle I a été adopté dans notre juridiction dès 1993.  Le ratio minimal de solvabilité des banques initialement fixé à 8 pour cent par la Banque de Maurice a été porté à 10 pour cent en 1998. 

Pour poursuivre avec notre expérience des Accords de Bâle, je tiens à souligner que l’adoption de Bâle II dans le pays en 2008 s’est déroulée de manière progressive donnant aux banques le délai nécessaire pour aligner leur cadre de gestion des risques sur les exigences de Bâle II.  De façon similaire, la mise en œuvre des exigences de fonds propres de Bâle III et du ratio de liquidité à court terme (Liquidity Coverage Ratio) a été un processus progressif.

En juin 2014, la Banque de Maurice a introduit une ligne directrice pour les banques d'importance systémique domestique (D-SIBs), visant à établir un système de référence pour évaluer l'importance systémique des banques et à garantir que les banques d'importance systémique ont la capacité d'absorber des pertes en augmentant leurs fonds propres. Le supplément de capital a été déterminé entre 1,0 et 2,5 pour cent selon l’importance systémique de ces banques.

Mesdames et Messieurs, malgré les impacts de la pandémie, la volatilité des marchés des changes et la hausse des taux d’intérêt, le secteur bancaire mauricien reste résilient.

Je suis convaincu que cette résilience découle, en partie, de notre adoption rapide des mesures spécifiques de Bâle III. Je suis donc enthousiaste à l’idée de poursuivre la mise en œuvre des mesures restantes de Bâle III et des Réformes de l’après-crise.

Nous prévoyons en l’occurrence le déploiement d'une série de mises à niveau réglementaires, notamment :

  1. L’introduction du ratio de liquidité à long terme (Net Stable Funding Ratio) pour assurer que les banques puissent maintenir un profil de financement stable sur le long terme ;
  2. L’introduction d'un ratio de levier comme mesure supplémentaire pour limiter l'endettement excessif dans le secteur bancaire ;
  3. L’alignement des pondérations réglementaires des risques pour les expositions aux risques de crédit, de liquidité, de marché et opérationnel avec Bâle III ; et
  4. L’amélioration de nos exigences en matière de divulgation et de reporting, qui comprendront également les informations liées au climat.

Je tiens à souligner, outre l’adoption envisagée des mesures de Bâle III susmentionnées, que j’ai toujours veillé à ce que l’amélioration continue du cadre de surveillance et de gestion des risques de la Banque de Maurice, dans son ensemble, prenne en compte les spécificités de notre propre topographie des risques.

À cet égard, nous accélérons la mise en œuvre complète de notre cadre de surveillance basée sur les risques, qui, d’une part constitue une boîte à outils de surveillance innovante et qui, d’autre part, nous offre un moyen d’aller plus en profondeur dans l’analyse de risques spécifiques afin d’assurer la stabilité financière de la meilleure manière qui soit.

J’ai la ferme conviction que cette approche s'intègre particulièrement bien à la méthodologie basée sur le risque de Bâle III.  Je pense en particulier au module de risque de marché qui nous fournit des informations importantes durant cette présente période de taux d'intérêt élevé.

Néanmoins, je suis certain que vous serez d’accord avec moi sur le fait que toute mise à niveau de cadre réglementaire et toute boîte à outils, aussi performantes soient-elles, doivent impérativement s’accompagner d’une formation continue des compétences de nos superviseurs pour qu'ils puissent réellement donner le meilleur d’eux-mêmes.

À cet effet, nous tenons particulièrement à ce que nos superviseurs possèdent les compétences requises pour se tenir au courant des derniers développements grâce à une combinaison de sessions de formation locales et étrangères. Nous avons également lancé la mise en œuvre des normes de Bâle III restantes avec un atelier de travail organisé par la Deutsche Bundesbank.

Mesdames et Messieurs, j’aimerais, avant de conclure, m’appesantir sur la révision des Principes Fondamentaux de Bâle pour un contrôle bancaire efficace qui est également un des sujets à l’ordre du jour.

Sur ce volet, je dois dire que la Banque de Maurice a pris l’engagement de mettre en œuvre les 29 Principes Fondamentaux de Bâle pour un contrôle bancaire efficace.  Selon la dernière auto-évaluation effectuée en 2022, la Banque de Maurice est « conforme » à 23 principes et « largement conforme » à 6 principes. 

La révision des principes fondamentaux arrive à un moment opportun compte tenu de l’évolution du système bancaire depuis le dernier examen en 2012. A cet égard, l'intégration des risques financiers liés au changement climatique ainsi que des exigences relatives à la cyber-résilience et à la résilience opérationnelle prend tout son sens. Néanmoins, ces nouveaux thèmes représentent des défis aux superviseurs compte tenu de leur complexité.

Mesdames et Messieurs, je suis convaincu que les idées et informations qui seront échangées lors de la Réunion d’aujourd’hui seront des plus enrichissantes et nous permettront à tous d’avancer en tant que Groupe.

Sur ce, en attendant de vous retrouver l’année prochaine pour la tenue de la Réunion Plénière du Groupe sous le soleil mauricien, je vous souhaite une excellente discussion.

Merci pour votre attention.

 

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Port-Louis

17 novembre 2023